Notes sur les carnets à plis
Depuis plusieurs années je travaille essentiellement la nature et le paysage en présence du motif, le plus souvent à taille réelle. A l’été 2009, j’ai découvert le Pachypodium bispinosum («pied épais»), un arbuste des milieux désertiques dont la conformation singulière allie les caractères de la roche à ceux de la végétation. J’en ai installé quelques-uns dans la lumière de mon atelier en les associant à des cactées et d’autres succulentes qui partageaient avec eux un aspect noueux, sculptural et très innervé.
J’avais rapporté de voyages en Asie des carnets à plis, dont certains pouvaient faire de 5 à 10 mètres de long. En les dépliant page après page, j’ai pu peindre spontanément de façon sérielle et traiter ces plantes extraordinaires comme l’intérieur d’un corps, où l’on discerne des fibres, des organes, un coeur. Parce qu’il la met merveilleusement en valeur, ce papier asiatique qui se révèle légèrement perméable à la peinture à l’huile m’a offert la possibilité de jeux avec la couleur, que j’ai alternée dans certaines séquences avec des noirs profonds. Mais au-delà de ce travail sur la couleur, je me suis découverte très libre face au sujet lui-même, aux collages possibles, aux repentirs, très libre avec la lumière et le temps. Et portée par cet élan particulier, j’ai enchaîné en quelques années une trentaine de carnets de différents formats.
Agnès Lévy, 5 novembre 2021